mardi 3 octobre 2017

Aux amis de François

(Cet article publié pour la Saint François d'Assise le 4 octobre est une transcription adaptée d'une  conférence donnée le 1er octobre 2017 à la paroisse Saint-François d’Assise (paris 19ème) dans le cadre du jubilé de 800 ans de l’arrivée des franciscains en France.)

Parcours de conversion
Même si je suis chrétienne dans le cœur, à un moment de ma vie, je ne me suis plus reconnue en tant que chrétienne, justement à cause de la séparation d’avec la nature et le vivant.
A ce titre, je me sens « marginale » et c'est une grande souffrance pour moi de voir comment on traite le monde, la nature, les animaux… et de voir l’indifférence des chrétiens sur ces questions. Pour moi, c’est un total contresens. Le salut, le ciel que nous cherchons, ne peut advenir que sur et par et avec la terre. J’ai le sentiment qu’en détruisant la création, Son œuvre, nous crucifions le Christ chaque jour.
Pourtant aujourd'hui, je comprends que c’est justement dans cette marge, dans cette « frange », dans ce désir de protéger et soigner ce monde, que je suis aussi profondément chrétienne. C'est, en fait l’écologie qui m’a ramenée à la foi.
Aujourd’hui, je comprends qu’il n’y a pas de spiritualité chrétienne sans écologie, une écologie au sens large. Il ne faut pas se tromper sur le sens de l’écologie. Je parle d’une écologie intégrale, pas intégriste; une écologie systémique qui inclut toute la création, l’humain y compris (écologie et pauvreté sont d’ailleurs intimement liés). La spiritualité chrétienne est par essence, une spiritualité de l’incarnation, souffle et matière - « Dieu s’est fait chair ». La chair de Dieu s’est le Christ, mais aussi toute la création sans une exception, qu’Il récapitule. L’écologie intégrale n’est pas un environnementalisme, ce n’est pas une somme de gestes à faire pour la planète, même si cela est nécessaire, c’est une vision et une relation au monde renouvelée qui nous engage dans la totalité de notre être, dedans/dehors, individuellement et collectivement, et qui précède et induit les comportements écologiques.
L’écologie n’est pas une option, c’est une nécessité intrinsèque à notre foi. Ce n’est pas la crise, la situation actuelle, qui nous engage à être « écolo » ; ajuster notre vision et nos comportements est un impératif éthique et spirituel intemporel. La situation actuelle rend cet impératif non optionnel.

Rôle des franciscains dans cette conversion
Cette écologie spirituelle, ou écospiritualité, concerne tout le monde sur cette terre, car nous partageons tous la « maison commune », mais elle nous concerne nous particulièrement, chrétiens, et nous particulièrement, amis et héritiers de François. Pourquoi ? 

Parce que Saint François a vécu, peut-être plus que n’importe quel autre, la proximité épidermique avec le cosmos, avec le Christ. C’est le précurseur qui a touché la lune et les étoiles. Il a ouvert la voie, balisé le chemin par sa façon de vivre, de se relier, de prêcher, d’aimer… Il n’y a pas un saint François unilatéral, prisonnier des savants, des historiens, des théologiens… -personne ne connait François dans toute sa complexité (et certainement pas moi), mais un François, libre et vivant qui touche et inspire chacun à sa façon.
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jeudi 6 avril 2017

AGNEAU PASCAL


Il est dit que l’Agneau de Dieu est venu et est mort sur la croix pour réconcilier le ciel et la terre, pour racheter l’Homme, pour effacer tous nos péchés, pour endosser toutes nos souffrances, les nôtres et celle de la création toute entière… Nettoyage intégral et radical s’il en est. Le grand ménage de Pâques, c’est le Christ qui l’a fait !

La mort de l’Agneau vaut pour la mort des tous les agneaux 
A Pâques, ne sacrifions pas l'AGNEAU une deuxième fois
Le sacrifice intégral rend tout sacrifice, de quelque nature qu’il soit, à commencer par le sacrifice animal, obsolète à tout jamais. La mort de l’Agneau vaut la mort des tous les agneaux, de tous les boucs et de tous les veaux...  Non seulement, Dieu en a "ras le bol" des sacrifices en son nom: "Que m'importe le nombre de vos sacrifices? - dit le Seigneur: Les holocaustes de béléiers, la graisse des veaux, j'en suis rassasié. Le sang des taureaux, des agneaux et des boucs, je n'y prends pas plaisir" (Isaï- 1,11), mais de plus, il nous envoie son Fils pour établir une nouvelle loi: 
"Le Christ commence donc par dire :

Tu n’as pas voulu ni agréé les sacrifices et les offrandes, les holocaustes et les sacrifices pour le péché, ceux que la Loi prescrit d’offrir.     Puis il déclare :Me voici, je suis venu pour faire ta volonté. Ainsi, il supprime le premier état de choses pour établir le second.     Et c’est grâce à cette volonté que nous sommes sanctifiés, par l’offrande que Jésus Christ a faite de son corps, une fois pour toutes" (He 10,4-10) [2]
Jésus nous dit clairement qu’il est venu au nom de Dieu « Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté » et que, dans cette venue, les sacrifices anciens n’ont plus lieu d’être et sont même contraires à la volonté divine. La mort du Christ sur la Croix parachève ce nouvel état des choses : tuer un animal au nom de Dieu est un contresens, puisque non seulement cela va à l’encontre de ce que Jésus nous révèle de la Loi de son Père, mais de surcroît cela "dépossède" le Christ de sa crucifixion, de son sacrifice en le rendant vain ou tout au mieux en le prenant pour un  "mal-entendu", un message entendu de travers ou pas entendu du tout. Lire la suite.....

samedi 25 février 2017

La nourriture, chemin de communion avec le monde


La nourriture est l’espace d’accueil par excellence de notre transformation, car elle nous relie au monde par tous les « bouts » de notre être - corps, cœur, esprit… Partant du constat d’effroyable prédation que nous opérons sur le vivant, et de cette rupture qui signe notre séparation de la nature, des autres êtres sensibles, de nous-même et du divin, comment la nourriture peut-elle justement nous conduire à développer une relation de douceur et de non-violence avec le monde ? Comment, sur notre chemin d’évolution, peut-elle nous permettre de passer de la séparation à la communion ?


Selon le principe d’unité fondamentale présent dans diverses traditions spirituelles, notre corps et le corps de la terre, temples sacrés de la vie, sont unis dans une étroite relation d’interdépendance. C’est dans cette relation qui m’unit pareillement aux étoiles et aux bactéries…, que j’existe. Seul, je ne suis rien. En ce sens, se nourrir est un acte éminemment symbolique (qui, selon son étymologie signifie : « mettre ensemble », « joindre »), car il  me relie au monde, et cela dans une double dynamique : de lui à moi, par les aliments (sa matière) que j’ingère (« je suis ce que je mange »), de moi à lui par la prédation plus ou moins grande que j’exerce sur lui. Cette nourriture, trait d’union entre mon corps et le corps de la terre,  à l’instar de l’eau, de l’air et d’autres nourritures plus subtiles (lumière, énergies…) signe mon inter-être avec le monde, en même temps que ma survie. Elle engage simultanément ma responsabilité à l’égard du vivant dans son ensemble.

Une violence généralisée
Sans s’étendre sur le constat désastreux de notre prédation sur le monde, notamment par la généralisation de l’agriculture, de l’élevage et la pêche industrielle, il faut cependant ouvrir les yeux sur la réalité actuelle, ne serait-ce que pour nous encourager à la transformer. Le fait est que, par la simple action de mettre un aliment dans notre bouche, nous commettons multiples violences : violence à la terre que nous polluons par toutes formes de toxines (pesticides, engrais, déchets plastiques, déjections multiples…) et dont nous suçons les mamelles exsangues comme des chatons avides, violence aux autres humains – qu’ils soient d’ ici, d’ailleurs et de demain, spoliés de leurs ressources minimales par notre consommation excessive, violence aux êtres vivants que nous tuons, volontairement ou inconsciemment (animaux d’élevage, poissons, mais aussi toutes les micro-vies présentes sur la terre et dans les airs), violence à ceux qui, privés du choix de leur alimentation, sont obligés d’ingérer une nourriture toxique (enfants dans les cantines, malades dans les hôpitaux, personnes âgées dans les hospices…). Lire la suite....